Pour que ce soit un souvenir, il faut de la douleur, et un beau paysage
Légionnaire instructeur, Stage Jaguar, Guyane Française, 2018.
Ma course triathlon Ironman, au Frenchman de Carcans, restera un très beau souvenir.
On peut commencer un compte rendu de course au matin de la course, mais dans le cas d’un Ironman, c’est un peu restrictif : il faut des mois de préparation physique et mentale pour être prêt le jour J, et chaque préparation est un cas particulier. Pour ceux qui veulent passer directement à la course, j’ai mis une –> dans le texte (et une vidéo récap à la fin). Mais bon, vous savez ce que j’en pense. Sur un triathlon vous seriez du genre à vouloir passer directement au ravitaillement d’arrivée… Un Ironman, la distance mythique du triathlon, c’est 4km de natation suivis de 180km de vélo et conclu par un marathon en course à pied (donc 42km). Pour la petite histoire, cette course a commencé dans la fin des années 70, lorsque des militaires américains badass au possible se disputaient pour savoir laquelle des trois épreuves d’endurance (natation, vélo, course à pied) était la plus difficile, aucun n’étant d’accord et chacun défendant sa discipline. Jusqu’à ce que l’un d’eux plus malin que les autres décide qu’on pouvait tous se mettre d’accord en faisant les trois à la suite et on verrait bien après si on était encore vivant (je rappelle que selon la légende, Philippidès, le 1e à avoir jamais couru un marathon est mort immédiatement après l’arrivée…). Ceux qui arriveraient à terminer ça serait des Ironmen, des hommes de fer. Les autres seraient des nullos. Notez en passant que l’épreuve proposée pour résoudre le problème ne répond en rien à la question, et que si ça avait été des scientifiques qui n’étaient pas d’accord, ils auraient probablement proposé que chacun fasse individuellement chacune des épreuves, mais en étant totalement reposés entre chaque, pour bien être capable de comparer. Ça aurait eu moins de gueule, mais ça aurait été largement plus faisable. Enfin, en vrai si c’était des scientifiques, ils auraient probablement essayé de résoudre ça par un modèle mathématique sans bouger le cul de leur tabouret de labo.
Bref, pour faire un Ironman, il faut donc non seulement être capable de faire chacune de ces distances, mais être capable de les enchaîner. Et ce n’est pas un détail, car outre le fait qu’alterner des sports qui sollicitent des muscles différents est difficile, c’est surtout la longueur de cette série qui est problématique. Il y a quantité de phénomènes physiologiques qui entrent en jeu, comme le fait par exemples que le corps ne peut pas assimiler plus qu’une certaine quantité d’eau ou de calories par heure ou par jour, et que cette course en demande plus que cette quantité… Autres exemples : pour 1h de natation, on passe environ 53min la tête sous l’eau (ou 875 mètres sous l’eau par km, grosso modo), et rien que pour le marathon, un coureur impose à chaque impact avec le sol une pression énorme sur ses articulations : pas loin d’une demi tonne pour un coureur de mon poids, près de 34 000 fois… Donc, la préparation du corps est importante.
La « mass start » des courses Ironman, ou comment commencer sereinement une course
Ma préparation a commencé en 2019, parce que je m’étais inscrit à l’édition 2020. En fait, je voulais faire un Ironman juste pour mes 50 ans. Alors que j’étais prêt, au moins dans ma tête, mais physiquement mieux que je ne l’avais jamais été, la covid a tout chamboulé et nous a renvoyé pour deux ans dans nos pénates. Et à part un peu de Home Trainer (vélo d’intérieur, ou HT) timide, je ne me suis plus entraîné avant 2021-2022. Une trop longue période qui m’a fait reprendre pas mal de choses à zéro. Pour la natation (je n’avais pas nagé depuis trois ans quand j’ai repris, en février 2022), ce n’était pas trop grave, car j’ai toujours été assez proche de zéro. Pour le reste, c’était embêtant, mais pas catastrophique non plus. Faut dire que je suis pas un crac à vélo, je n’ai commencé que lorsque je ne me suis inscrit au triathlon (pareil pour la natation d’ailleurs). La course à pied est mon point fort, et ceux qui me connaissent, avec mes 6min/km de moyenne et mes marathons à 5h, comprennent ce que ça veut dire pour le reste si ça c’est mon point fort. Mais non en fait, je suis pas juste : mon point fort c’est le mental, et on verra plus bas que c’est important en triathlon longue distance.
Bref, la prépa. Comme je n’arrivais pas à me mettre à l‘entrainement, j’ai acheté (cher !) un plan d’entraînement sur internet. Un plan très complet, « garanti », impressionnant de détails. Chaque semaine il y avait possibilité de faire jusqu’à 9 séances, chacune avec trois options de difficulté, décrites avec moult détails et fioritures, et évidemment téléchargeables individuellement sans possibilité de copier-coller pour l’arranger à ma sauce. Un plan sacrément compliqué où chaque séance était millimétrée à la seconde et au mètre, et avec à chaque fois des lignes et des lignes de choses différentes à faire. En résumé, un plan très contraignant, pas fun du tout, fait certainement pour un droïde, pas pour quelqu’un comme moi, à la fois flemmard et allergique aux contraintes. Après plusieurs semaines sans y toucher, je me suis dit qu’il fallait que je me fasse quelque chose d’un peu construit, mais made in Franck. Donc j’ai opté pour les critères suivants. 1/ la course à pied c’est le truc de la fin, on n’a pas le choix, et on a 7h pour un marathon, donc c’est pas infaisable. Faut juste faire gaffe parce que quand on est crevé, les 7h c’est pas non plus un méga-luxe. Ma préparation pour ça a été presque uniquement mentale : j’ai fait en novembre le marathon de Paris, un peu sur un coup de tête (quelqu’un m’a offert la place à 15j de la course), et je l’ai fait « fatigué », pour mimer un peu celui de l’Ironman. Pour cela, j’ai fait bcp de Home Trainer la semaine avant, j’ai dormi aussi peu que possible, et j’ai éliminé tout glucide de mon alimentation pendant 10j. Le jour J, j’étais tellement crevé que j’avais du mal à monter les escaliers du métro pour aller au sas de départ, et les premiers km ont été particulièrement éprouvants. Mais ça a tenu, je l’ai fini, et je me suis dit que bon, la course à pied c’est géré, je peux faire un marathon en commençant fatigué, donc je coche. J’ai donc après ce mois de novembre fait je crois un semi, et quelques 10km tranquilles, et c’est tout. Sauf que j’ai presque systématiquement à partir de janvier complété mes séances de HT par 10 à 30 min de Course à Pied (CaP) tranquille, pour la transition.
La Course à Pied c’est tellement facile. Moi je fais ça sur une jambe.
2/ natation : je suis tellement nul, avec mes pieds qui raclent le fond de la piscine et mes battements de crawl que les coaches disent ressembler plus à de la brasse, qu’il fallait que je le travaille, car j’étais pas sûr de faire moins que les 2h limites. Je m’y suis donc remis sérieusement. En février, après 3 ans sans entrainement… Je n’y ai été que trois mois, mais avec trois séances par semaine, j’ai eu l’impression de net progrès. En partant d’une nage de poulet épileptique, vous pourrez penser que c’est pas compliqué de progresser, mais si. Nanméoh !
3/ vélo : comme ça fait une très grosse partie de la course, en km comme en temps, je me suis dit que j’allais mettre le paquet dessus. Mais comme j’ai peur d’être en vélo sur la route à cause de tous ces tarés qui frôlent exprès les cyclistes qui ralentissent leur voiture de 4 minutes, et tous ces inconscients qui les frôlent sans faire exprès (vous êtes dans quelle catégorie ?), j’ai privilégié le HT, qui n’est pas idéal selon les coaches (qui ont toujours raison) mais qui m’a permis de continuer l’hiver quand il pleuvait ou gelait, avec l’avantage supplémentaire de me laisser regarder des séries hautement intellectuelles pendant mes longues séances. Comme The Office ou SuperGirl. Donc beaucoup de HT. Relativement parlant. Disons par rapport au reste quoi.
4/ le plan. Bon, là j’avoue j’ai un peu été flemmard. J’ai juste appliqué deux principes. Premièrement, il faut que ce soit progressif. Donc je suis parti d’une semaine à 6h d’entrainement, et j’ai augmenté doucement toutes les semaines, pour arriver à 15h la dernière. Avec toutes les trois semaines une semaine de repos, de moitié moins d’heures. Une augmentation douce en dents de scie. On est loin des 20h préconisées, mais je suis loin des mecs capables de le faire. Et évidemment, ayant peur de la blessure, j’ai quand même écouté mon corps et j’ai systématiquement repoussé au lendemain quand je le sentais pas. Si je suis totalement déraisonnable dans l’effort et vais régulièrement jusqu’au malaise pour ne pas m’arrêter, je suis en revanche très raisonnable en dehors et je m’écoute. Peut-être pour ça que je ne me blesse pas. Enfin je me cogne souvent dans les meubles et les murs, mais ça c’est un autre problème. Deuxièmement, il faut faire environ 80% de « zone 2 », la zone de battements de cœur d’effort « facile » (pas évident quand tu regardes The Mandalorian en même temps que tu pédales) et 20% seulement d’intensif. Ça c’était nouveau parce que jusqu’ici aux entrainements je m’arrangeais toujours pour sauter les séances de fractionné et je faisais 100% de non-intensif. Mais bon. Ah oui, et troisièmement, le reste je faisais au feeling. Les séances de natations étaient programmées par le club, donc disons 3-5h par semaine, le reste était pour du vélo, avec qq miettes de CaP ensuite. Facile comme programme. Même si j’avais prévu, j’ai pas vraiment fait gaffe à la nutrition (même pas réussi à perdre du poids comme les autres années, donc triathlon version phoque, la nage facile en moins), ni au repos : couché tard comme d’hab, et pas réussi à lâcher le boulot avant mai. Pas vraiment un plan que je pourrai commercialiser.
Mon plan d’entrainement home-made. Il n’est peut-être pas sérieux, mais je l’ai suivi sérieusement.
Les deux semaines avant la course : repos et préparation mentale. Je vous épargne ma méthode, mais en deux mots, à part y penser bcp, je me projette dans des situations beaucoup plus difficiles (commandos, handicaps, parcours extrêmes, …), ce qui fait que le jour J, je suis prêt à endurer beaucoup plus. En un mot, je pars au combat, et si j’ai pas un sac de 30 kg à porter à la nage, avec des balles qui sifflent autours de moi, je m’estime chanceux et en balade d’agrément. Et s’il y a un orage de grêle pendant une canicule qui me fait chuter en vélo sur des bouts de verre, je rigole doucement que c’est tout ce que vous avez ? Allez, vazy, j’t’attends moi ! La douleur pendant la course, il faut s’y attendre et s’y préparer aussi. Il faut la guetter, la surveiller, puis il faut l’accepter, l’embrasser pleinement même, pour l’explorer, l’étudier, afin de mieux l’ignorer, voire la rejeter. Evidemment il y a des techniques pour éviter qu’elle ne grandisse. Par exemple, une douleur à une cuisse ou un molet en vélo peut se dissiper avant d’empirer en ne pédalant pendant un moment qu’avec l’autre jambe. Ça marche bien. En course à pied, moins simple de courir sur une jambe, mais on peut apprendre à relaxer certains muscles et faire partir certaines douleurs aux pieds, aux quads, aux hanches. Et si on y arrive pas, par exemple pour les douleurs vraiment trop lancinantes comme celles du ventre, ou celles qui ne partiront pas comme des ampoules ou des frottements, alors il faut juste l’endurer. Se battre avec et ne pas céder.
–> Donc le jour J. Pas dormi de la nuit, mais pas un pb, je m’y attendais, et j’ai bien dormi les trois nuits d’avant. Excitation plus que stress. Pour une fois. Les organisateurs ont prévenu que c’était une course rapide mais que si le vent se levait, ça allait piquer. Et le vent s’est levé. La préparation habituelle du matos, ne rien oublier, les tonnes de petits trucs différents qu’il faut avoir bien réglé parce qu’une fois en course c’est plus possible de revenir en arrière. Je suis serein, je suis prêt, et visiblement les organisateurs n’ont pas parlé d’ennemis qui nous tireraient dessus pendant la course, ou d’un lâcher de requins dans le lac ou autres surprises qui auraient pu rendre la course un peu challenging. Là ça va être la routine. Faut juste avancer, pas céder, et être patient. Fastoche donc. Pressé d’en découdre, même. Arrivés sur la plage, ambiance. Après nous avoir laissés un peu barboter pour nous échauffer, Super Frenchman nous réunis sur la plage de départ, nous demande de mettre tous un genou à terre et chanter la marseillaise ensemble. Je ne suis pas super fan de ce chant, mais j’avoue que près de 500 personnes en combinaison, serrés les uns contre les autres face à l’épreuve qui nous attend, dans une communion de posture et de cordes vocales, ça mettrait des frissons à un dromadaire. Il faut, parce qu’on se lève, coup de feu, et massive ruade hystérique à l’assaut des flots. Et là, une petite surprise : une fois le passage obligé par les coups et bousculades dus à des dizaines de voisins qui nagent le même crawl (enfin, en mieux), les corps s’espacent progressivement, mais pas le chaos. Mais que se passe-t-il donc fichtre damned ? Le fameux vent, qu’on redoutait tous en vélo, mais qu’on n’avait pas pensé devoir affronter à la natation. En fait, je pensais même pas que c’était possible d’avoir des vagues dans un lac. Dans un lac quoi ! Des vagues pas particulièrement hautes, mais suffisamment fortes et irrégulières (et de biais), pour déstructurer le peu de nage que j’avais appris. Difficile de glisser sur l’eau quand on est balloté verticalement, qu’on est repoussé en arrière par la vague pour « retomber » dans son creux et recommencer une seconde plus tard. Les 2000m du premier tour passent assez lentement, mais je sors en 45 min et le coup d’œil à ma montre me donne confiance : je nage n’importe comment, avec une fréquence de bras quasiment du double de ce que je voulais, je m’épuise bêtement, mais je n’ai pas de retard et au moins si je continue comme ça je ne serai pas éliminé en dépassant les 2h de nat. Le 2e tour est malheureusement encore pire que le premier, le vent ayant forcit. Le premier tour m’a fait penser à l’intérieur d’une machine à laver. Dans le 2e, la machine à laver a été mise dans le métro Chatelet aux heures de pointe un jour de grève. Imaginez : vous êtes dans un métro bondé, et les gens vous bousculent sans vergogne. Une pousse dans le dos, des pousses sur le côté, un coup sur le bras, une claque derrière la tête, une sur le visage… comme ça aurait été le cas dans un tel métro, je sens la colère monter en moi, incapable de formuler des pensées plus cohérentes que « je… mais… ARRÊTEZ QUOI !!!! ». Je me rends compte de la stupidité de se fâcher contre des vagues et je transforme ma colère en agressivité dans ma nage, ce qui m’aide bien. Les poissons se sont barrés super loin, ils ont compris que c’était pas le jour. Sur les dernières centaines de mètres ça se calme, et je peux enfin étendre ma nage et glisser un peu. Je me dis que ça aurait été tellement plus simple et moins fatiguant si ça avait été comme ça tout du long. Mais je suis pas là pour le facile, sinon j’aurai juste été courir avec Petiplato. Je sors pas totalement épuisé, mais avec évidemment la tête qui tourne d’avoir été à l’horizontal pendant une heure trente et de devoir courir rapidement jusqu’à l’aire de transition. Là, j’attends mon tour pour accéder au paravent, parce que je veux me changer totalement et faire le vélo avec un cuissard vélo et souffrir un peu moins pendant les longues heures sur ma selle. Deux paravents seulement, et bcp de gens qui ont la même stratégie que moi (perdre un peu de temps ici pour ne pas le perdre en vélo parce qu’on a trop mal au cul dans sa fine trifonction). Parce que si on montre ses fesses, mesdames et messieurs, on est disqualifié. Même si comme moi on a de très belles fesses. C’est pas logique, je sais. Je pense que c’est pour pas créer de la jalousie dans les coureurs. Bref, une fois changé, j’enfile mon casque et mes chaussures et je cherche bien 5 minutes mon 2e gant. Après avoir décidé que les gants ça sert à rien de toutes façons, je repars, pour finalement retrouver mon gant à la sortie : quelqu’un de gentil l’a ramassé et l’a placé à 20 mètres de là où il a dû le trouver. Donc transition de plus de 13 minutes, et 70 places de perdues (heureusement que je me fiche du classement). La prochaine fois je mettrai mes chaussures sur le vélo avec des élastiques pour gagner 45 secondes.
Sortie « à l’Australienne » au milieu de la nat, histoire de faire un peu plus mal, comme tout ce qui est Autralien…
Je pars en vélo. Enfin, je m’arrête au départ pour accrocher ma montre au vélo parce que j’ai oublié et que comme ça je peux perdre une minute et une demi douzaines de places de plus, et je pars. Mon plan est de faire 30km/h, pas parce que c’est ce qui correspond le mieux à mes capacités physiques, ou au terrain, ou à mes performances passées ou prédictions statistiques, mais parce que comme ça je fais les 180km en 6h pile et je passe pas toutes ces heures à essayer de faire des calculs de moyennes trop compliqués pour un cerveau privé d’oxygène. Bon, 30km/h c’est tout à fait faisable pour moi, mais normalement pas pendant des heures. On verra. Le vélo il faut le faire en moins de 8h, et c’est donc pas la barrière horaire qui me fait peur, mais plutôt la crevaison ou la casse. J’ai cassé un dérailleur deux semaines avant, j’ai eu des problèmes de chaine et de pneus, et je n’ai qu’une peur c’est que mon vélo me lâche quelque part au long de ces longues heures d’effort. Enfin non, j’ai deux peurs, que mon vélo me lâche et que je tombe. Enfin non, j’ai trois peurs, que… mais je m’aperçois que je suis un peu long déjà. Donc allons à l’essentiel. J’ai très mal (dès le départ, ce qui est étrange) aux quads, j’ai l’impression qu’ils vont se déchirer. J’ai aussi très mal aux chevilles. Ça me parait encore plus bizarre jusqu’à ce que je me souvienne qu’au boulot on m’a dit qu’avec mon Ironman j’allais avoir les chevilles qui enflent, donc je me rassure, ça doit être ça. Je suis essoufflé presque en permanence sur les 30 premiers km, et Fafa m’a dit que c’était le signe à suivre pour la limite de fatigue à ne pas dépasser. Mais en même temps, je veux faire mes 30km de moyenne, et avec ce @$%§ de vent ! Au final, ça va je finis à un peu plus de 29km/h au bout de 6h09, mon vélo a tenu (merci Petitplato pour la révision et Oliv pour les pneus!) et mes chevilles n’ont pas explosé. Ça sera peut-être pour plus tard.
Franchement, mon vélo je le trouve beau comme un camion
Deuxième transition, plus simple parce qu’il ne faut pas une heure pour enlever une combinaison est trop petite. Faut quand même se changer totalement, mais sans être mouillé et avec moins de matos, je mets que 5-6 minutes, ce qui est quand même 5-6 fois plus que ce qu’il faudrait, mais bon, on n’est pas aux pièces hein, avec le prix qu’on paie, on peut bien profiter un peu ! Bref, je suis confiant pour la CaP, c’est pour ça que j’en ai presque pas fait. Je sais que je peux faire un marathon en commençant épuisé. J’avais pas réalisé que j’aurai aussi très, très mal aux jambes et que j’avais pas spécialement préparé ça mais il est trop tard pour reculer. De toutes façons un marathon à reculons c’est pas la solution. Je pars, et je sens tout de suite que mes entraînements en transition paient car j’arrive à mettre un pied devant l’autre sans trop de problème. Mon fils Cyrian m’intercepte rapidement pour courir un peu avec moi en me hurlant dans les oreilles que je peux le faire, mais un arbitre l’arrête rapidement en lui disant qu’il pourrait me disqualifier. Il stoppe un peu déçu, et moi aussi (enfin moi je stoppe pas). Pas longtemps plus loin, Stéphane, notre Préz de club me rejoins aussi, mais là c’est moi qui lui dit que je suis dans le collimateur d’un arbitre et qu’il ne faut pas courir avec moi. Il stoppe aussi, déçu j’imagine, et moi aussi (mais non, je stoppe pas !). Le premier tour se passe relativement bien, beaucoup de monde sur le bord, dont mes deux enfants et leur mère qui m’encouragent à pleins poumons. Non seulement j’adore les voir sur le bord de la route, mais je suis impressionné de les avoir croisés autant de fois. Il faut dire que ma fille Laurine a organisé le parcours, et que comme elle fait toujours tout très bien, ils ont réussi à me voir 22 fois en tout au cours de la journée. 22 rappels tonitruants que j’ai pas intérêt à échouer parce qu’ils ont pas fait tout ce chemin pour rien. Au bout d’un tour, c’est au tour d’Oliv de la Team Levague de me rejoindre (Astrid m’a croisé deux fois à vélo avec Amélie), je lui dis également qu’il peut pas courir avec moi, mais le fourbe a imaginé un stratagème imparable que la décence m’interdit de révéler ici, et il peut courir avec moi en toute impunité avec son dossard de la course de la veille. Mais non je l’ai pas dit ! Il m’encourage tout du long, parfois rejoins ou remplacé par PPG ou par Cyrian, ce qui fait que non seulement j’ai pas besoin de musique, mais en plus j’ai du coaching mental tout du long (moins rythmé que Black Eyed Peas mais plus mélodieux que Jul). Ça commence comme ça : « ah regarde tous ces loosers qui marchent ! on marche pas dans un marathon, sinon ça compte pas ! Toi t’es fort, tu marches pas, réalises ça ! », ça continue avec « bon ok dans les côtes c’est pas trop grave si tu marches, ça compte pas même : ça perd pas trop de temps et tu le rattrapes après. C’est acceptable du moment que c’est juste les côtes », puis ça fini avec « allez, au poteau là-bas tu reprends un peu la course ; ou alors au banc là après ; ou l’arbre après le banc là… ». Faut dire qu’à peu près à la moitié du 2e tour (sur 4), je suis pris de terribles crampes d’estomacs qui me plient en deux et m’arrachent malgré moi des cris de douleur. Ça m’est déjà arrivé, c’est semble-t-il lié au manque d’irrigation dans l’estomac, le sang étant parti s’occuper des muscles des jambes, qui bossent eux, môssieur, et donc la moindre chose dans l’estomac fait horriblement mal. Enfin, il paraît, je sais pas. Mais avant ça n’avait jamais été au point de m’empêcher de courir et ça durait une demie heure, pas comme ici deux ou trois heures. Ça fait si mal, surtout quelques secondes après la moindre gorgée, que j’ose plus rien boire ou manger, même si je connais les dangers de la déshydratation à ce stade. Tant pis, si mon corps veut plus rien avaler, il n’aura rien. On va bien voir qui est le plus têtu des deux. Bref, j’alterne tant bien que mal la course de tortue et la marche de manchot en poussant des petits cris de goret, sous un beau soleil en alternant les forêts de pins odorants et les foules citadines en délire, et je finis avec un temps à faire pâlir un ours polaire, qui frôle les 6 heures, mais bien bien. Ça fait 14h tout pile, sur la ligne d’arrivée, où je suis content de retrouver d’abord Super Frenchman qui s’inquiétait un peu, et ma famille et les copains et copines du club, qui sont super sympas de m’avoir attendus tout ce temps (Coach Seb est arrivé depuis 3h !). C’est long, c’est lent, mais je pensais honnêtement devoir me battre contre les barrières horaires, et taquiner dangereusement la limite des 17h, donc c’est plutôt pas mal, surtout en considérant que j’ai marché pas loin d’1h30.
Oliv, à fond dans son rôle de lièvre motivateur, parce qu’il trouve sûrement que je me la coule douce
Moi qui pensais assez probable de finir tellement mal que je passerai ma nuit à l’hosto, je suis plutôt en bonne forme (j’ai terminé certains marathons en plus mauvais état). Peut-être parce que la marche ça repose. Le lendemain, pas trop de courbatures, et deux jours après plus rien. Je suis assez étonné : fatigué, mais pas épuisé, pas mal partout, aucune ampoule, deux ongles abimés mais qui s’accrochent à la vie et aux doigts de pied, qq frottements improbables mais pas de bobo ou malaise majeur. Finalement j’ai peut-être pas assez poussé…
A gauche, mon arrivée au marathon de Barfleur, avec l’empathie de ma famille, à droite l’arrivée de l’Ironman, j’avais compris que ça servait à rien d’essayer de les apitoyer
Et pour une version en image et en musique, voici le film récapitulatif de la course. Merci à Laurine et à Super Frenchman pour les clips.
(Cliquer sur la photo pour démarrer le clip)